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LE VISIBLE ET L'INVISIBLE. FRANCE ELLE.
9 janvier 2025

Battles. Partie 2. Discussion houleuse avec Lisbeth.

 

Elle était mal à l'aise, culpabilisée et complexée par ses aveux puisqu'elle les adressait à celui qui était toujours son mari.

-Tu voudrais divorcer ? C'est ton projet, Lisbeth ?

-J'y pense, oui mais pas maintenant. Nous allons bientôt revoir Colin et Lisa, nos enfants. Il faut qu'ils nous sentent liés. Et puis, nos biens nous ont été confisqués en Ambranie et nos comptes bancaires bloqués. Juridiquement parlant, ce serait une mauvaise tactique que de divorcer.

-Eh bien ! Quelle femme de tête ! Lisbeth, je suis un romantique. Je crois que malgré tous nos différends et toutes nos tribulations, je ne me séparerai jamais vraiment de toi.

Elle sourit mais redevins vindicative :

-Beau compliment. Tu es un homme à femmes.

-Pendant toutes ces années, je n'ai fait que croiser des femmes. Certaines étaient très courageuses. Je vivais difficilement et j'ai très peu fait l'amour. La cavale, la prison et l’hôpital.

-Tu es en Angleterre et tu redeviens très séduisant. Les femmes, elles te regardaient tout le temps là-bas ; elles vont recommencer ici.

Il sourit. Elle n'avait pas tort.

-Mais, ce que je veux te dire est autre.

-Eh bien, dis-moi...

-J'ai toujours trouvé que tu plaçais très haut les amitiés masculines. Pour moi, tu es l'homme d'une amitié amoureuse avec un autre homme, voilà tout. Je l'ai pensé très tôt et maintenant que je te retrouve, je le pense de nouveau. Je ne dis pas que vous auriez des relations charnelles car elles te gêneraient mais le fait est.

Elle le vit froncer les sourcils et pâlir. Qu'est-ce qui le tourmentait ?

-Ah, tu penses à l’université, à certains de mes amis...

A vingt ans, il avait beaucoup souffert de la mort brutale de ses parents et l'amitié avait beaucoup de sens pour lui. Qu'il ait eu des attachements excessifs pour des camarades d'étude ou quelques professeurs présumait-il de son orientation future ? Mais de là à parler d'amour...

-Cette période est lointaine.

-Il y a eu tes années cavale et la prison.

Cette fois, il blêmit.

-Je t'interdis ! On m'a arrêté, on m'a fait une parodie de procès et on m'a envoyé à Étoile où j'ai été brutalisé, drogué, mentalement torturé ! On m'a trafiqué le cerveau ! J'ai signé des aveux ! Je me suis renié moi-même ! Tu n'as pas la moindre idée de ce que j'ai enduré quand on m'a libéré ! Neuf mois en Suède. Deux opérations. Et l'Angleterre...Ce n'est pas mon éventuelle ambiguïté sexuelle qui occupe mes journées crois-moi, c'est ce qu'on a tenté de faire : me vider de moi-même, m'apprendre à dénoncer, à punir...

Lisbeth se mit à pleurer silencieusement.

-Je suis si désolée.

Il s'adoucit :

-Tu t'es éloigné d'un mari volage puis prisonnier je ne sais où et tu as trouvé l'amour avec une femme ? Si tu es heureuse avec elle, pourquoi pas ! Mais laissons les souvenirs abrupts, les rancœurs, les souffrances mal digérées car on va devenir fous avec ça !

Elle s'apaisa.

-Je suis heureuse que tu sois vivant, Paul. J'espère que ta vie sera belle ici.

-Je ferai mon possible.

Ils parlèrent encore et commandèrent des desserts. Puis, ils sortirent dans la rue et se saluèrent. Comme il marchait d'un pas vif dans la rue, elle le héla et il se retourna pour la voir. Elle n'était pas belle, trop maigre, trop pâle et il la trouva mal habillée mais il fut content. Elle s'approcha :

-C'était peut-être comme ça quand on s'est aimés.

-Je le crois.

-Et puis, on a eu si peur ! Je t'ai cru mort.

-Moi aussi, j'ai pensé que tu avais disparu.

Ils s'étaient retrouvés. Ils s'étreignirent.

Dans les semaines qui suivirent, ils s'écrivirent.  Ils n'avaient plus le cœur à se réprimander et cherchaient à se rassurer l'un l'autre.

Paul resta encore chez ses hôtes. Il connaissait Londres et le Kent pour avoir fait des années auparavant des séjours en Angleterre pour ses études. Sillonner une capitale transformée, aller au spectacle avec eux, dîner dans des restaurants huppés étaient après tout très agréables comme évoquer les grands écrivains anglais qu'ils avaient lus au cours de leur vie. Quant à l'excursion à Oxford pour faire connaissance de Matthew, elle fut délicieuse. Mais Paul ne pouvait rester à charge d'hôtes aisés, si charmants fussent-ils...Il devait travailler. On lui fit signer un contrat pour une école de journalisme à Londres et il se mit aussitôt à préparer ses cours. Elle se situait à Kensington où on lui trouva un petit appartement à louer. Pour la première fois depuis des années, il allait vivre libre dans un espace certes réduit mais qui lui permettrait de vivre et de penser comme il l'entendait.

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